Collage, l’art d’assembler
Ce mois de septembre a été placé sous le thème du COLLAGE. Tout d’abord, j'ai réalisé une création pour promouvoir le programme officiel de la rentrée de Césure. Ensuite, j'ai eu l'occasion de présenter une performance en créant un grand collage sur un mur d’expression libre lors des Journées Nationales des Artistes 2025. Il me semble donc essentiel de partager avec vous ce qui m'attire dans le collage et de son impact sur le monde de l'art ainsi que sur la société.
Un peu d’histoire
Avec à peine 100 ans d’existence, le collage, souvent considéré comme un art mineur est pourtant un outil pilier dans l’histoire de l’art moderne. Georges Braque et Picasso sont considérés comme les premiers à s’aventurer dans le collage. C’est aussi le dadaïste Raoul Hausmann qui développe la technique de photomontage et de jeu de typographies. Pourtant d’autres artistes, des femmes, sont à mettre en valeur sur ce sujet.
L’apport essentiel d’Hannah Höch. En effet, d’Hannah Höch (1889 — 1978) a été une pionnière du mouvement Dada, et ses œuvres sont vraiment uniques. Elle n’a pas seulement été la compagne de Raoul Hausmann (!) Avec ses photomontages et collages, elle ouvre des fenêtres sur un monde en transformation. Elle ne se contente pas de créer de belles images, elle utilise son art pour dénoncer les failles du système politique et social de son temps. Elle aborde avec audace des sujets comme l'effondrement de la république de Weimar et les murmures souvent silencieux des vies féminines.
Collage et critique sociale et féministe. Martha Rosler, née à Brooklyn en 1943, est renommée pour ses collages, outils puissants de critique sociale. Son œuvre dénonce notamment la guerre au Vietnam et défend des idées féministes. De manière similaire, Barbara Kruger, née en 1945, artiste conceptuelle américaine influencée par le mouvement féministe de son temps, fusionne le texte et l’imagerie dans ses collages pour explorer les thèmes du pouvoir, de la surconsommation et de l’identité.
Le collage comme outil de revendication
Bien que le collage soit encore souvent perçu comme un “truc de bonnes femmes”, il est indéniable que les artistes spécialisées dans le collage sont désormais reconnues et mises en lumière dans le milieu contemporain. Le collage peut représenter une expression personnelle ou s'inscrire dans une démarche collective, qu'elle soit à petite ou grande échelle. Mais En essence le collage est un moyen d’expression des problématiques contemporaines.
Le collectif Collages Féminicides. Depuis 2019, le collectif confronte les passants à une réalité trop souvent mise sous silence : violences conjugales, LGBTQIA+phobies, racisme et validisme. Une nouvelle génération de militantes s’empare du collage pour clamer une vérité qui dérange. Le collage devient ainsi le signe de l'appropriation de l'espace public. L’ouvrage Sous les collages la rage , édité chez Textuel, rassemble les messages percutants du collectif. À soutenir !
Des artistes mises en lumière par Rebeka Elizegi. La collagiste espagnole, née en 1968, a sélectionné le travail de 50 femmes artistes internationales dans le livre L’art du collage au féminin . Cet ouvrage démontre que l’imagination féminine s’exprime librement et sans la contrainte normative fixée par un milieu artistique qui, trop souvent, invisibilise les femmes. À lire !
L’influence de Wangechi Mutu dans le monde de l’art contemporain : L’artiste kenyane-américaine, née en 1972, explore des thèmes tels que l’identité, le genre, le colonialisme et le corps. Elle fusionne souvent des éléments des traditions africaines avec des images de science-fiction et des influences surréalistes. J’adore !
Le collage comme outil de visualisation
Ce n’est pas nouveau, parallèlement à mes projets photographiques, je plonge volontiers dans le collage. La superposition d’images est une continuité de mon métier de graphiste, mais guidée par l'envie de m'éloigner des écrans. Cette pratique artistique passe par le plaisir tangible et sensoriel du papier et le doux son de la découpe au cutter. Dans mon atelier – un espace dynamique avec une table à découper mobile et des tiroirs débordant de papiers et de magazines chinés ou gardés précieusement – je me sens légèrement fébrile avant de commencer. Ce moment chaotique, ce désordre créatif est essentiel à mon processus. Je passe du chaos au calme en assemblant des images entre elles. Le monde retrouve son sens.
C’est mon outil de visualisation, d’incantation. Avant de commencer un collage, j’ai déjà en tête un sujet, parfois lié à l’actualité, parfois à un vécu, parfois je réponds à une commande. Puis face aux papiers et formes découpées, je laisse mes mains assembler des couleurs et des matières. L’instinct prend le dessus. La broderie enrichit mes compositions, ajoutant des lignes graphiques inspirées de l'art amérindien. Je tisse des histoires avec le fil blanc, qui suture et relie, apportant une dimension nouvelle au papiers assemblés. C'est un peu comme redéfinir le monde, même si c’est juste image par image. En créant des strates d’images et de significations, j’invite à une exploration introspective et à une visualisation positive du monde.
Le collage n’a pas fini de nous permettre d’imaginer d’autres mondes.