Rencontres d’Arles 2023

D’accord, je l’avoue, ça fait des années que je vais tous les étés aux Rencontres Photographiques d’Arles. Comme une amoureuse transie, qui ne lâche pas son premier objet d’amour. Déambuler d’une expo à une autre à travers la ville est un pur bonheur. Toutes ces années m’ont permis de continuer à éduquer mon œil. La culture visuelle est une quête sans fin. À chaque fois, j’ai eu la chance de découvrir et d’être émerveillée par d’anciens tirages, de nouveaux artistes ou simplement par des scénographies d’expositions réussies. Mais c’est la première fois que je fais la semaine professionnelle entière ! L’excitation d’avoir le temps de voir toutes les expositions, en plus de suivre les conférences et les moments forts de la semaine, a été à son comble. Seule la chaleur intense de ces premiers jours de Juillet ont su me terrasser, par intermittence. Rencontre(s).

Expositions phares

Evidement, impossible de faire un récapitulatif de toutes les expositions présentées, sans parler des galeries en ville. Je fais ici un focus sur mes deux photographes phares de la semaine :

• Découverte des superbes tirages de Dolorès Marat ! Cette photographe devrait être connue et reconnue pour son corpus photographique de haute volée ! Il s’en dégage un mystère, une ambiance feutrée et un sentiment de solitude, d’isolement tout simplement superbe ! Elle arrive à saisir non pas un instant mais des sensations, c’est de la poésie.
Elle me donne un peu d’espoir, car en réalité elle a commencé son travail artistique à 40 ans. Tard. D’abord apprentie chez un photographe, ensuite laborantine, elle se décide enfin à saisir ce qu’elle voyait dans son quotidien, d’abord avec son Minolta puis son Leica. Elle utilise le procédé Fresson  pendant longtemps, ce qui donne à ses photos une touche si particulière, désormais c’est un tirage sur papier japon qui magnifie ses prise de vues. Du grand art.

L’exposition de Saul Leiter, « Assemblages » a confirmé l’amour que j’ai pour ses photos, elles sont intemporelles, on est dans la sensation pure ! L’expo est un assemblage d’instants fugaces qui sont traitées comme des tableaux, des touches de couleur, des premiers plans, des flous, des ambiances et toujours un cadrage impeccable. L’Expo m’a paru super courte, j’aurais aimé en voir encore plus. très éL’interview, sous forme de vidéo, qui nous montre un artiste dans son atelier, prenant du recul sur son parcours artistique, assumant ses choix, même lorsqu’il état incompris, voire critiqué d’arrêter le NB au profit de la couleur. Les gens aiment bien mettre les artistes dans les cases et pourtant Saul Leiter a voulu être libre dans sa démarche artistique. Les difficultés financières ont été nombreuses mais on le sent heureux d’avoir fait ses propres choix.

Workshop

Le workshop avec Eric Bouvet, photographe reporter ayant une carrière de plus de 40 ans. Il a su nous remuer les tripes avec ses récits de reportages vécus et nous secouer les puces avec ses conseils et mise en application avec des exercices bien concrets. Un jour et demi est évidement trop court pour approfondir quoi que ce soit mais finalement j’en ressorts de bons conseils sur la méthode de travail et le plus dur pour moi : accepter de rater une photo ! La laisser filer.
Conseils à suivre absolument : même si on a une minute pour prendre un portrait, préparer dans sa tête la prise de vue, prendre le temps de cadrer, attendre le bon moment et shooter une fois, pas 15 comme on le fait avec le numérique (!). En fait travailler comme si on avait un appareil argentique entre les mains. Des idées qui résonnent en moi : un photographe est rarement satisfait de ce qu’il fait, c’est un travail de tous les jours, on doit faire ses gammes, comme un musicien, et on n’a jamais atteint la perfection. Chaque prise de vue est un nouveau challenge.   

Artistas Connexion

Mon amie argentine Cécilia Garcia me présente Mon. a Ross qui me conseille d’aller voir le superbe travail de la vénézuélienne Oleñka Carrasco. Je note. Lors de la soirée Les Filles de la photo, où j’étais avec mon acolyte Alice Murillo, notre marraine, Laure Bouvet de Well Done John, nous présente Olenka en chair et en os ! Je n’avais pas encore vu son expo mais la connexion était là : une femme d’une belle énergie. Laure qui lui demande alors de nous donner un conseil. Oleñka nous demande si on parle anglais et nous dit en souriant « STAY STRONG » ! Banal mais tellement vrai. Ne pas lâcher, accepter les refus et continuer à faire des dossiers de concours, résidences. Et effectivement, j’ai adoré son expo « Patria » et le livre, sous forme de Fanzine, est très réussi. Elle aborde un sujet qui me touche personnellement, l’éloignement de la famille et le décès d’un père - Rafael, comme le mien. Comment vivre et gérer tout ça de loin ? Le deuil à distance.

Climat en premier plan

Je suis tellement heureuse que le réchauffement climatique devienne un réel sujet à Arles ! D’une part dans les choix des expositions comme par exemple « Grow Up », l’excellent travail de Roberto Huarcaya « Traces » qui reprend le principe du photogramme mais à taille de forêt amazonienne ou encore d’Isadora Romero avec « Fumée, Racine, Sémence » a gagné le Prix Découverte Louis Roederer. Les Rencontres est un véritable laboratoire d’expérimentations, le choix des salles, des œuvres, de l’aération naturelle grâce à des structures de présentation accrochées, la réutilisation des matériaux… on sent que l’effort est réel. Work in Progress évidemment car rien n’est parfait. Peut-être qu’il faudra penser Les Rencontres en hiver ou dans le nord, car ça risque d’être compliqué de visiter les salles d’expo en 2050, lorsque qu’Arles comptabilisera 243 jours de sécheresse par an… En attendant on fait au mieux, c’est déjà pas mal.

Une histoire de rencontres

Comment ne pas parler des quelques beaux moments de rencontres comme, le vernissage de l’exposition « Manifestes » d’Amnesty international & Myop, la soirée Les Filles de la Photo, le vernissage de la Galerie Fisheye puis la soirée Fisheye, des dîners en bonne compagnie et surtout la célébration du 1er anniversaire de notre Collectif L’inconnu(e). Nous avons fait notre petit bonhomme de chemin depuis notre rencontre à la formation PV20 des Gobelins. Il est temps de remettre un petit coup de boost. Et cette année c’était l’occasion de célébrer intimement le lancement de mon projet professionnel. Oui, parce que je dois bien l’assumer : passer photographe pro est un peu comme le lancement d’une fusée, beaucoup de tests, d’échecs, d’écritures, d’améliorations, de contre-tests, de rencontres, pour une réussite en rien certaine. Il faut juste y aller, continuer, ne pas lâcher !  



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